L’estonien appartient à la branche fennique de la famille des langues finno-ougriennes. Il est étroitement apparenté au finnois, et plus lointainement au hongrois. Il est parlé par environ 1,1 million de personnes, dont la grande majorité (950.000) habitent en Estonie.

Typologiquement, l’estonien représente une forme de transition entre langue agglutinante et langue flexionnelle. Il a subi au cours de son histoire une forte influence de l’allemand, dans son vocabulaire comme dans sa syntaxe. Il a par exemple développé un système de verbes à particule dont la forme et le fonctionnement rappellent les verbes à particule séparable de l’allemand.

L’arbre des langues finno-ougriennes

Sur le plan phonologique, l’estonien se caractérise notamment par l’existence de trois durées vocaliques et consonantiques : la plupart des phonèmes peuvent être brefs, longs ou surlongs. Cette présentation des faits a néanmoins été remise en question dans les années 1990. Plutôt que de décrire la durée des phonèmes, de nombreux linguistes préfèrent aujourd’hui parler de durée des syllabes (voire des groupes de deux syllabes) et réduisent le système ternaire traditionnel à un emboîtement de deux oppositions binaires : les syllabes accentuées peuvent être brèves ou longues et les syllabes longues peuvent porter un accent fort ou ou faible.

L’accent tonique est sur la première syllabe des mots, sauf dans les mots d’emprunt relativement récents, où il s’est souvent maintenu à la place qu’il avait dans la langue d’origine.

L’alphabet estonien est l’alphabet latin augmenté de quelques signes diacritiques : äöü se prononcent comme en allemand ; õ note une voyelle d’arrière, non arrondie (c’est le u français mais prononcé avec les commissures des lèvres tirées vers l’arrière, comme i).

L’orthographe ne distingue pas les phonèmes longs et surlongs : les uns comme les autres sont notés par une lettre double, tandis que les phonèmes brefs sont notés par une lettre simple. La seule exception concerne les occlusives, pour lesquelles trois graphies différentes existent : en position intervocalique, les brèves sont notées bdg, les longues ptk, et les surlongues ppttkk.

L’estonien ne connaît pas le genre grammatical et ne possède pas d’articles. La déclinaison comprend 14 cas : nominatif, génitif, partitif, illatif, inessif, élatif, allatif, adessif, ablatif, translatif, terminatif, essif, abessif et comitatif. L’une des particularités de ce système casuel est l’absence d’accusatif ; le complément d’objet peut être marqué, selon les contextes, par le nominatif, le génitif ou le partitif :
• Anna mulle raamat ! “Donne-moi le livre.” (raamat : nominatif)
• Ta andis mulle raamatu. “Il m’a donné le livre.” (raamatu : génitif)
• Ta ei anna mulle raamatut. “Il ne me donne pas le livre.” (raamatut : partitif)

Le déterminant précède toujours le déterminé. L’adjectif épithète s’accorde en nombre et en cas avec le substantif auquel il se rapporte : valge|te|s maja|de|s “dans les maisons blanches”. Toutefois, il n’y a pas véritablement d’accord en cas au terminatif, à l’essif, à l’abessif et au comitatif (seul le substantif prend la marque du cas, l’adjectif a quant à lui la forme du génitif).

Le système verbal se caractérise par l’absence de futur (on utilise le présent) et par l’existence de formes spéciales pour exprimer l’action accomplie par une personne indéterminée (l’équivalent du “on” français) ainsi que le discours rapporté (mode verbal spécifique appelé “mode oblique” ou “médiatif”). Il existe au moins deux infinitifs : le premier, terminé par le suffixe -ma, est la forme qui figure dans les dictionnaires ; il est utilisé par exemple après les verbes signifiant “devoir” ou  “commencer à” : pean lugema “Je dois lire”. Le deuxième infinitif, terminé surtout en -da ou en -ta (mais aussi en -la-na ou -ra), s’utilise par exemple après les verbes signifiant “pouvoir”, “vouloir”, “aimer” : tahan lugeda “je veux lire”. Certaines grammaires considèrent aussi comme un infinitif spécifique la forme en -vat (correspondant au médiatif présent) lorsqu’elle est employée après un verbe d’apparence (signifiant “sembler”) : ta näib lugevat “il semble lire”.