Au mois de juillet, l’actualité en Estonie s’est résumée, pour le plus grand bonheur des Estoniens et des touristes, à quelques mots : il a fait beau et chaud !

Si l’été n’a pas été désagréable non plus en août, l’actualité a repris ses droits.

Depuis le 1er juillet, les transports en commun régionaux (lignes dotées par l’État) sont gratuits dans 11 des 15 régions d’Estonie. La mise en place du système a été scrutée de près et chaque petit problème a été évoqué dans la presse. Outre l’application ou non selon les régions, la gratuité n’est pas appliquée partout de la même manière, avec des régions où tous les voyageurs en bénéficient et d’autres où seules certaines catégories de passagers (par exemple les personnes âgées) y ont droit. La cohabitation de systèmes différents ne simplifie pas les choses. À Tartu, il est interdit de monter dans un car régional qui a pour terminus Tartu, les transports en commun sur le territoire de la ville étant payants. Conjuguée à une météo exceptionnellement bonne, la mise en place de la gratuité a été un succès, la fréquentation a sensiblement augmentée (+92 % dans l’Ida-Virumaa !). Les lignes desservant des lieux touristiques comme les plages ont été prises d’assaut, la gratuité attirant des personnes qui n’avaient pas les moyens de voyager avant (les adolescents principalement). Les entreprises de transport ont dû mettre en circulation des cars supplémentaires. La hausse de la fréquentation a toutefois entraîné les critiques des habituels voyageurs lorsqu’il n’y avait pas assez de places ! S’il est trop tôt pour juger du succès de la mesure sur le long terme, elle a déjà eu pour conséquence la fermeture de lignes de la part des entreprises gérant des lignes commerciales (non financées par l’État).

L’une des autres sagas de l’été a été sans conteste la perte d’un missile par un avion militaire espagnol lors d’une mission de l’OTAN dans le ciel estonien début août. Malgré les recherches lors des semaines suivantes dans les régions de Tartumaa et de Jõgevamaa, notamment dans la réserve naturelle d’Endla, le missile n’a pas été retrouvé. Le missile s’est-il auto-détruit en vol ou s’est-il écrasé, aucune information n’a été diffusée à ce sujet.

Sujet de débat dans toute l’Union européenne, la question du changement d’heure au printemps et à l’automne a aussi été à l’Une en Estonie. Le gouvernement estonien a apporté son soutien à la fin de ce système, une mesure largement plébiscitée. Toutefois, reste la question de la future heure à adopter : l’heure d’hiver (fuseau horaire UTC+2) ou l’heure d’été (fuseau horaire UTC+3). La plupart des prises de parole ont été faites en faveur de l’heure d’été. Selon ses partisans, utiliser l’heure d’hiver ferait vivre les Estoniens dans le noir plus souvent, notamment en août lorsque la durée du jour diminue brusquement. Le soleil se coucherait trop tôt et empêcherait la population de profiter des dernières soirées de clarté estivale avant l’automne. Si le gouvernement n’a pas tranché, la commission des Affaires étrangères du Riigikogu a elle apporté son soutien à l’heure d’été. Néanmoins, les autorités ont aussi exprimé leur volonté d’avoir une heure similaire à la Lettonie et à la Finlande.

Le 23 août, anniversaire de la signature du Pacte Molotov-Ribbentrop et journée européenne du souvenir des victimes de tous les régimes totalitaires et autoritaires, un nouveau monument, le Mémorial des victimes du communisme a été inauguré à Tallinn. Aménagé à proximité du mémorial de Maarjamäe, un monument de l’époque soviétique dédié « à ceux qui ont combattu pour la liberté de l’Estonie », ce mémorial se compose d’un mur du souvenir, sur lequel est inscrit le nom de plus de 22 000 victimes de la période soviétique qui n’ont pas de sépulture personnelle, d’un monument à la mémoire des officiers estoniens exécutés ou morts en détention et d’un jardin. Les représentants de l’État, des forces armées et des différentes confessions religieuses étaient présentes à la cérémonie aux côtés des proches de victimes et des porteurs de la mémoire des victimes.

Côté politique, l’été a été marqué par une nouvelle affaire de corruption, à Narva cette fois. Huit membres (Parti du Centre) du conseil municipal de la ville sont soupçonnés par la justice. Face à cette affaire, les instances centrales du Parti du Centre, soucieuses de tourner la page des années Savisaar, ont demandé aux personnes de quitter l’assemblée locale le temps de l’enquête, faute de quoi elles seraient exclues du parti. Estimant n’avoir rien à se reprocher, les huit personnes soupçonnées ont quitté le parti d’elles-mêmes. 12 des 13 autres membres restant du groupe au conseil municipal en ont fait de même, provoquant une perte de majorité pour le Parti du Centre. La majorité est désormais entre les mains des mêmes élus, mais sans l’étiquette Parti du Centre. Ainsi, la volonté de la formation de lutter contre la corruption n’a pas eu l’effet escompté : les élus soupçonnés siègent toujours et se sont affranchis de la tutelle de la direction centrale du parti, qui conserve toutefois le poste de maire.

Dans le même temps, les partis politiques estoniens se mettent en ordre de marche pour la campagne électorale à venir et les analystes politiques dessinent les différents scénarios possibles après les élections de mars prochain. Le Parti du Centre et le Parti de la Réforme semblent partis pour se disputer la première place, suivi par le parti EKRE. Les regards sont surtout tournés vers les plus petites formations dont l’objectif d’atteindre 5 % des votes, condition pour obtenir des élus. Entré pour la première fois en 2015, le Parti libre est en proie à des luttes internes et ses chances de succès (avoir des élus) semblent limitées. Outre sa crise interne, le parti doit faire face à l’arrivée d’un nouvel acteur sur la scène politique, Eesti 200, qui pourrait bénéficier de son étiquette de novice pour séduire les électeurs, comme l’avait fait le Parti libre il y a cinq ans. Enfin, les formations politiques tentent d’attirer dans leurs rangs différentes célébrités des médias, du monde de la culture, du sport.

Enfin, 2018 continue de marquer le centenaire de la République d’Estonie. À cette occasion, les festivités du 20 août (anniversaire du rétablissement de l’indépendance en 1991) ont pris une dimension un peu plus grande que d’habitude. Le temps fort a été l’organisation à l’esplanade des chants de Tallinn d’un concert de 100 minutes intitulé Üheslaulmine. Composé de 26 chansons patriotiques, chants de marins, chansons pour enfants entre autres et diffusé à la télévision, ce concert a pu être suivi dans le monde entier. En de nombreux endroits, en Estonie ou à l’étranger, des rassemblements ont été organisés pour suivre le concert et chanter à l’unisson le répertoire proposé.

Photo : Priit Mürk / ERR