Fin mai, les Estoniens ont pu recommencer à refaire ce qu’ils leur plaisaient. Grâce à l’amélioration sensible des données sanitaires, de nombreuses restrictions ont été levées et le gouvernement a annoncé de nouveaux allégements pour juin. Tant en devant respecter certaines jauges (200 personnes), les restaurants (à l’intérieur), les cinémas, les théâtres ont pu rouvrir aux clients, cette limite s’appliquant aussi aux offices religieux. Parmi les dernières structures fermées, les spas et les centres aquatiques ont pu rouvrir le 31 mai. À la toute fin du mois, le gouvernement a même annoncé la fin du port du masque obligatoire en intérieur à partir du 2 juin.

Le taux d’incidence national est tombé à 163/100000 (sur 14 jours) au 31 mai. Néanmoins, des disparités subsistent toujours. On note l’absence de nouveaux cas dans de nombreuses communes rurales du centre du pays ; à l’inverse, Narva, et le Virumaa oriental dans son ensemble, et Valga se distinguent par des taux supérieurs à la moyenne nationale. Il semblerait que les célébrations de la Pâque orthodoxe début mai et du 9-Mai (célébration de la victoire soviétique lors de la Seconde Guerre mondiale) ont permis une recrudescence du virus, qui semble désormais en voie de disparition.

Le processus de vaccination est désormais ouvert à tous les adultes. Dès que de nouveaux créneaux de vaccination sont annoncés, le site d’inscription est pris d’assaut, provoquant parfois plusieurs heures d’attente. (Habitués à la simplicité permis par les solutions numériques mises en place par l’État depuis de nombreuses années, les Estoniens se demandent comment une telle attente est possible. De son côté, les autorités prennent conscience que tout n’est pas aussi à la pointe que ce qu’on croyait.) Les rendez-vous des principales villes sont rapidement réservés et certains se retrouvent à devoir prendre rendez-vous là où des doses sont encore disponibles. Un « tourisme vaccinal » se met ainsi en place, notamment à Narva. Alors que les locaux sont moins enclins à se faire vacciner (25 % de la population du Viru oriental ont reçu au moins une dose, contre 36 % à l’échelle du pays), les habitants des autres régions vont dans la ville de l’Est du pays pour contourner l’attente.

Avec l’arrivée au pouvoir d’une coalition formée du parti de la Réforme et du parti du Centre, la question d’un budget public équilibré est redevenue d’actualités. Face aux difficultés financières engendrées par la gestion de la crise sanitaire, des mesures de restrictions budgétaires ont été annoncées par différents ministères. L’une des décisions les plus critiquées a été l’annonce du ministre de la Défense Kalle Laanet (parti de la Réforme) de démanteler l’orchestre et le service des aumôniers de l’armée et l’orchestre de la police et des gardes-frontières et la constitution d’un orchestre unique sous administration du musée de l’Armée. Ce choix a immédiatement rencontré l’opposition du monde de la musique et une centaine de personnes a manifesté le 25 mai à Tallinn pour soutenir les orchestres. De même, l’annonce du gouvernement de réduire le financement par les communes des activités extrascolaires des enfants estoniens a provoqué le fort mécontentement des structures de protection de l’enfance.

Dans le même temps, l’économie estonienne retrouve des niveaux similaires à ceux avant le début de la crise sanitaire. Au premier trimestre 2021, le PIB a augmenté de 5,4 % par rapport au premier trimestre 2020, permettant de revenir au niveau des volumes enregistrés en 2019.

Régulièrement, la construction de nouvelles infrastructures permet de compléter le passé estonien. Récemment, plusieurs chantiers ont permis la mise au jour de trouvailles archéologiques. À Tartu, des travaux dans le quartier de Supilinn ont révélé les sépultures de soldats de l’armée du tsar Pierre Le Grand, tombés au combat pendant le siège de la ville en 1704 au cours de la Grande Guerre du Nord, une première découverte de ce genre en Estonie selon les spécialistes. Dans le centre-ville, une partie des fondations de l’ancienne halle marchande (Kaubahoov, 1816-1941) ont été dégagées dans le parc central. Toutefois, l’état des murs ne semblent pas permettre leur mise en valeur. Enfin, un amateur de géologie et paléontologie a découvert des fossiles de poissons vieux de 380 millions d’années, rares dans la région de Tartu. À Tallinn, où les chercheurs ne perdent pas l’espoir de faire toute la lumière sur les origines exactes de la ville (avant la conquête danoise), les fouilles à l’emplacement d’un bâtiment détruit au début de l’avenue de Pärnu, ont permis la découverte d’une route utilisée jusqu’au XVIIe siècle. De manière générale, le patrimoine archéologique est aussi source de débat. Le projet d’extension de l’opéra Estonia a fait parler des nombreux vestiges enfouis, tels les bastions de défense des XVIe-XVIIIe siècle.

Côté diplomatie enfin, à la surprise générale, la présidente estonienne a rappelé l’ambassadeur estonien à Paris, Clyde Kull. Pilier du ministère des Affaires étrangères depuis le début des années 1990, Clyde Kull est soupçonné de détournement de fonds publics et de mauvaise manipulation de secrets d’État.

Photo : Ken Mürk / ERR