Le 31 août, les députés estoniens ont élu l’actuel directeur du Musée national estonien Alar Karis à la présidence de la République au second tour de l’élection présidentielle par 72 voix pour, 8 bulletins blancs et 19 abstentions. Généticien et biologiste de formation, celui qui a été recteur de l’université des sciences de la vie d’Estonie (2003-2007) et de l’université de Tartu (2007-2012) puis auditeur général d’Estonie (2013-2018) succédera à Kersti Kaljulaid le 11 octobre prochain pour un mandant de cinq ans. Avant cette issue, le parlement s’était déjà réuni pour un premier tour la veille. Soutenu par la coalition gouvernementale formée du parti du centre et du parti de la réforme, Alar Karis, seul candidat présenté, n’avait obtenu que 63 voix, en deçà des 68 suffrages requis.

Contrairement à 2016 où plusieurs candidats avaient été portés par les différentes formations politiques estoniennes, permettant une campagne électorale, les mois précédant le scrutin de 2021 ont surtout été marqués par la recherche de candidats de la part des partis politiques. (En Estonie, ce sont les parlementaires qui proposent la candidature d’une personne, et non une personne qui se porte candidate.) Le Parti conservateur estonien (EKRE) a très rapidement annoncé que son candidat serait Henn Põlluaas, mais tout en sachant qu’il lui serait impossible de participer au scrutin parlementaire, faute d’avoir les 21 soutiens de députés nécessaires à la validation d’une candidature. En revanche, les partis de la coalition, parti de la réforme et parti du centre, ont bataillé pour trouver un candidat commun et éviter le scénario de 2016 où pas moins de six tours de vote avaient été nécessaires pour trouver un successeur à Toomas Hendrik Ilves. Si le parti de Kaja Kallas n’avait rien contre un second mandat de Kersti Kaljulaid, qui jouissait d’un soutien populaire supérieur à toutes les autres personnalités politiques évoquées, le parti du centre de Jüri Ratas a rejeté cette éventualité. Nom déjà évoqué au printemps, le parti du centre a un temps envisagé soutenir la candidature de Tarmo Soomere, océanographe, président de l’Académie des Sciences d’Estonie. Toutefois, les autres partis politiques ont refusé de s’accorder autour de sa personne. Après une série de refus de différentes personnalités, les deux partis de la coalition ont réussi à obtenir l’aval d’Alar Karis une dizaine de jours avant le scrutin. Après un premier test non concluant, A. Karis a finalement reçu le soutien de suffisamment d’élus de l’opposition pour accéder au poste suprême. La page de l’élection présidentielle a ainsi été tournée plus vite que ce que l’incertitude des mois précédents avait pu laisser croire.

Août 2021 a marqué les 30 ans de la restauration de l’indépendance de l’Estonie, le 20 août 1989. Les évènements déclenchés par la tentative de putsch à Moscou ont été largement commémorés malgré la pandémie. Outre les traditionnels temps forts (lever du drapeau à Toompea, réunion du Club du 20-Août, réception présidentielle dans la roseraie de Kadriorg), la journée s’est achevée par un concert à Tallinn. Le programme contenait bien évidemment les principales chansons de la Révolution chantante mais plutôt de clore le spectacle, elles l’ont ouvert. Ensuite, les spectateurs ont effectué un voyage musical à travers les décennies de l’après 1991 ponctué des chansons qui ont marqué les années passées.

En juin, la situation liée au Covid-19 laissait espérer un été calme, toutefois, la diffusion du variant delta a déclenché une détérioration continue au cours des deux mois estivaux. De 28 le 1er juillet, le taux d’incidence est passé à 343 fin août. Face à cette évolution, le gouvernement a progressivement renforcé les restrictions, prenant désormais en compte l’existence du passe sanitaire. En août, le contrôle du passe a été rendu obligatoire pour les événements en intérieur de plus de 50 personnes et en extérieur de plus de 100 personnes. Le 26 août, le port obligatoire du masque, entre temps rétabli dans les transports publics, a été réinstauré pour tous les lieux publics où le passe sanitaire n’est pas vérifié (centres commerciaux, établissements de santé…). Ce retour du masque a eu pour effet la généralisation du contrôle du passe sanitaire dans de nombreux lieux comme les restaurants.

Dans ce contexte, des manifestants ont utilisé le jour symbolique du 23 août (le 23 août 1939, l’Allemagne nazie et l’URSS signaient un traité de non-agression ; 50 ans plus tard, les Baltes organisaient la Voie balte pour dénoncer l’occupation soviétique) pour protester contre les règles sanitaires. En 1989, les Baltes avaient réclamé la liberté pour leurs pays, en 2021, les manifestants ont réclamé la liberté de choix concernant la vaccination. De leur côté, les organisateurs de la Voie balte de 1989 ont regretté que cet événement historique soit récupéré par un tel mouvement.

Le 8 août, l’Estonie a perdu l’une de ses figures littéraires avec le décès de Jaan Kaplinski, à l’âge de 80 ans. Poète et prosateur, mais aussi auteur de livres pour enfants, Kaplinski a été distingué à nombreuses reprises en Estonie et à l’étranger. Il a notamment reçu le prix européen de littérature en 2016. En 1980, il a également été l’un des signataires de la Lettre des 40, une lettre ouverte publiée par des intellectuels estoniens pour la défense de la langue estonienne dans le contexte de russification.

Fin juillet et début août, 34 Estoniens ont participé aux Jeux olympiques d’été de Tokyo (Japon). La délégation est rentrée en Estonie avec deux médailles : le bronze pour l’escrimeuse Katrina Lehis et l’or pour l’équipe féminine d’épée composé de Katrina Lehis, Irina Embrich, Erika Kirpu et Julia Beljajeva. Si les escrimeurs estoniens avaient remporté des médailles aux championnats du monde et aux championnats d’Europe, ces deux médailles en escrime ont marqué la fin d’une longue attente puisqu’il s’agit des premières médailles olympiques dans ce sport depuis 1991. L’actuel entraîneur de l’équipe féminine Kaido Kaaberma avait dû se contenter de la quatrième place en 1992 à Barcelone, tout comme l’équipe féminine d’épée à Rio en 2016.

D’autres médailles étaient envisagées mais les autres sportifs ont dû se contenter des places d’honneur. Les rameurs en aviron quatre de couple, médaillés d’argent à Rio, ont terminé à la sixième place de la finale et la lutteuse Epp Mäe n’a pu faire mieux que huitième. De son côté, Rasmus Mägi, spécialiste du 400 m haies, a répété sa performance de Rio en se hissant en finale, de laquelle il a terminé à la septième place en établissant un nouveau record d’Estonie.

Au milieu de l’été, le Tõll, l’un des bacs reliant l’île de Muhu (par laquelle on accède à Saaremaa) au continent a été victime d’un accident à son arrivée à Kuivastu (île de Muhu). En raison d’une défaillance technique, le bateau n’a pas pu s’arrêter et a percuté le quai. Au-delà du fait divers et des dégâts matériels, l’événement a refait parler des liaisons maritimes avec les îles et a un temps exacerbé les jalousies entre les îles de Saaremaa et de Hiiumaa. En effet, le Tõll a été rapidement remplacé par l’un des bacs qui relie habituellement Hiiumaa et le continent. Les habitants de Hiiumaa ont dû alors se contenter d’un autre bateau de remplacement, plus petit.

Enfin, au cours de l’été, un nouveau bus autonome a été présenté en Estonie. Développé par l’entreprise Auve Tech et l’université de Tartu, ce véhicule, propulsé à l’hydrogène, est une première mondiale selon ses concepteurs. À partir du 2 septembre, ce prototype va être tester pendant deux mois sur une ligne régulière entre le centre-ville de Tartu au Musée national estonien dans le quartier de Raadi.

Photo : ERR / Priit Mürk