Janvier marque le début de plusieurs événements qui vont se dérouler sur plusieurs mois en 2025. Tout d’abord, Tallinn porte le titre de capitale européenne du sport. Chaque mois de l’année met une discipline sportive à l’honneur, par exemple celui de janvier est placé sous le signe du ski. Des animations vont être organisées régulièrement pour permettre à tout le monde de se familiariser avec les différents sports présentés.

L’année sportive a aussi commencé avec la tenue des championnats d’Europe de patinage artistique (organisés dans la capitale estonienne pour la troisième fois après 2010 et 2022) du 28 janvier au 2 février. Un an après la médaille d’argent historique chez les hommes d’Aleksandr Selevko, tous les regards étaient cette fois tournés vers la compétition femmes et Niina Petrõkina. Sixième en 2023 et absente en 2024, l’Estonienne faisait partie des favorites pour le titre. Deuxième après le programme court, Petrõkina, soutenue par le public tallinnois, a ensuite réalisé la meilleure performance de sa carrière lors du programme libre, ce qui lui a permis d’imposer et de remporter le titre européen, une première pour le patinage estonien. De son côté, Aleksandr Selevko a échoué à réitérer sa performance de 2024 en se classant à la neuvième place, deux rangs derrière son frère Mihhail (7e).

Parallèlement à Tallinn, capitale du sport, la ville de Narva est capitale finno-ougrienne de la Culture. Il s’agit de la troisième fois que le titre est porté par une municipalité estonienne après Obinitsa (Setomaa) en 2015 et Abja-Paluoja (Mulgimaa) en 2021. Alors que Narva est avant tout vue comme une ville russophone (sa population a été totalement remplacée après la Seconde Guerre mondiale), les porteurs du projet culturel souhaitent mettre en avant l’histoire finno-ougrienne de la ville et de sa région, le Virumaa oriental, et de l’Ingrie voisine où se sont côtoyés Ingriens, Votes et Finnois d’Ingrie.

Enfin, 2025 marque aussi les 500 ans de la publication du premier livre en estonien. Pour l’occasion, l’année a été faite Année du livre. L’événement a été officiellement lancé par le président de la République Alar Karis le 30 janvier, jour de la littérature estonienne, près de la statue de Kristjan Jaak Peterson (vu comme le premier auteur littéraire en langue estonienne) sur la colline de Tartu. Le chef de l’État a remis le Prix de l’Enseignant de littérature de l’année à l’occasion. Une conférence s’est tenue à la bibliothèque universitaire. Le même jour, le gouvernement estonien a tenu son conseil des ministres au musée de la Littérature. Les festivités officielles auront lieu jusqu’au 14 mars, jour de la langue estonienne (jour de la naissance de K. J. Peterson).

Le 1er janvier a signifié l’entrée en vigueur de différentes mesures fiscales, adoptées par l’exécutif pour tenter d’équilibrer le budget de l’État et pour financer la politique de défense du pays. Parmi les mesures prises, une nouveauté a été particulièrement décriée : la taxe à l’immatriculation d’un véhicule et la vignette auto annuelle. En janvier, les propriétaires de véhicule ont ainsi été notifiés par le Service des Impôts du montant de leur vignette (à payer en deux fois, en juin et en décembre). Toutefois, c’est la taxe à l’immatriculation qui a fait le plus de bruit. En effet, les conséquences ont été immédiatement visibles pour les personnes cherchant à vendre ou à acheter un véhicule. Au prix du véhicule s’ajoute désormais une taxe qui peut augmenter la somme à débourser par l’acheteur d’un pourcentage rédhibitoire. Dès lors, les acheteurs renoncent à leur projet et les personnes qui n’ont pas réussi à vendre leur véhicule avant le changement d’année ne trouvent pas preneurs.

Source de colère chez beaucoup, la question de la hausse des taxes, principalement menées par l’ancien ministre des Finances Mart Võrklaev, a aussi été à l’origine d’un spectacle. Le 25 janvier, des personnalités de la musique, de la politique, du journaliste sont montés sur scène pour cuisiner Mart Võrklaev (en sa présence) dans le cadre d’une mise en scène intitulée Võrklaeva röst.

Au début de l’année également, une réforme des paiements en espèces est entrée en vigueur en Estonie. Lors d’un paiement en espèces, afin de ne plus avoir recours aux pièces de 1 et 2 centimes lors du rendu de la monnaie, le montant total à payer est désormais arrondi à 0 (si le prix se termine par 1, 2, 6 et 7 centimes) ou 5 (si le prix se termine par 3, 4, 8 et 9). Lors d’un paiement par carte bancaire ou de transfert, la somme demeure inchangée. Il faut aussi noter que les pièces de 1 et 2 centimes peuvent toujours être utilisées comme moyen de paiement (dans la limite de cinquante pièces).

Le 6 janvier, pour la première fois en trente ans, une connexion ferroviaire entre Tallinn, Riga (Lettonie) et Vilnius (Lituanie) a été rétablie. En effet, les entreprises Elron (Estonie), Vivi (Lettonie) et LTG Link (Lituanie) ont uniformisé leurs horaires afin de créer une ligne reliant les trois capitales. S’il n’est pas question d’offrir un service direct entre les trois villes, l’uniformisation permet toutefois aux voyageurs de bénéficier d’horaires limitant l’attente en gare. La patience est malgré tout de mise car toute personne souhaitant aller de Tallinn à Vilnius doit effectuer un changement à Valga/Valka et à Riga (changement supprimé en février), pour un trajet de plus de dix heures.

Le 8 janvier, l’Estonie a rendu un dernier hommage à l’ancien président Arnold Rüütel, décédé le 31 décembre, lors d’obsèques nationales. La journée a été rythmée par des cérémonies à Toompea près du Parlement, à l’Opéra de Tallinn et au palais présidentiel de Kadriorg.

D’autres funérailles ont eu lieu le lendemain : les cendres de l’écrivain August Gailit (1891-1960), l’un des fondateurs du groupe d’écrivains expressionnistes Siuru en 1917 ont été inhumées à Tallinn. Comme beaucoup d’intellectuels et de personnalités politiques de l’époque, Gailit a fui l’Estonie en 1944 au retour de l’Armée rouge et a fini sa vie en Suède. Ce transfert fait suite à d’autres réinhumations : Otto Tief (Premier ministre en 1944) en 1993, Tõnis Kint (Premier ministre de l’Estonie en exil entre 1963 et 1970) en 2013, l’écrivaine Mari Under en 2016…

Alors que l’année sera avant tout marquée par les élections locales en octobre, la vie politique de janvier 2025 a été marquée par une polémique liée à la nomination d’un nouveau Secrétaire général de l’État par le gouvernement après que Taimar Peterkop, a annoncé quitter le poste qu’il occupait depuis 2018 à la fin du mois de janvier. Le gouvernement a fait le choix de Keit Kasemets, le secrétaire général du ministre du Climat. Ce choix a nécessité une réforme législative pour supprimer l’exigence d’une formation supérieure en droit pour les candidats. Immédiatement, l’opposition est montée au créneau pour dénoncer une politisation d’un poste dont la mission est d’assister le gouvernement dans la conduite de sa politique. Il était inacceptable que le Premier ministre Kristen Michal choisisse le secrétaire général d’un ministère dont il a été le ministre jusqu’en 2024. La polémique n’a toutefois pas fait reculer le gouvernement qui a rappelé que la réforme législative avait déjà été souhaitée du temps où le Parti du centre était à la tête du gouvernement (sans toutefois être menée à son terme, Taimar Peterkop étant juriste).

Enfin, une autre polémique a agité le monde politico-médiatique. Comme chaque année, les différentes chaînes de télévision estoniennes proposent un programme de divertissement terminer l’année. Le 31 décembre 2024, la télévision publique ETV a entre autres diffusé un extrait d’un spectacle de drag queens des étudiants de l’école des arts de la scène (structure de l’Académie estonienne de Musique et du Théâtre). D’abord portée par le député Varro Vooglaid (EKRE) (qui a été à l’époque le leader de l’opposition contre l’ouverture du mariage aux couples homosexuels) puis par d’autres personnalités de droite, une fronde est apparue contre le choix fait par ETV de montrer le spectacle des étudiants, réclamant un droit de regard sur les programmes pour les membres du conseil de surveillance de la télévision publique. Malgré l’apparition de la politique, la majorité des journalistes et la direction de la chaîne ont soutenu le choix fait le 31 décembre.

Photo : Priit Simson / Delfi Meedia