En juin, l’Estonie a levé presque l’intégralité des restrictions liées au Covid-19. Annonce a été faite que l’Agence de santé allait lever l’état d’alerte le 1er juillet. Au cours du mois, le taux d’incidence est passé de 154 cas pour 100 000 personnes (sur 14 jours) le 1er juin à 29 cas le 30 juin. Le nombre de personnes hospitalisées est passé d’une centaine à moins de 20 et « seulement » onze décès ont été enregistrés au cours de la période. En parallèle de l’amélioration sanitaire, la vaccination se poursuit. Fin juin, 42 % de la population avaient reçu au moins une dose (33 % ont reçu deux doses). Toutefois, les autorités restent prudentes, notamment avec la propagation du variant Delta. Dans ce contexte, la région de l’Ida-Virumaa est source d’inquiétude car seulement 29 % de la population ont débuté le processus de vaccination. Et malgré l’amélioration générale, certains événements ont été annulés : ainsi, les Tall Ships’ Races, course de grands voiliers qui devaient faire escale (pour la toute première fois) à Tallinn mi-juillet lors de l’édition 2021, ont été annulées après le retrait des villes-étapes finlandaises et reportées à 2024.

La fin des restrictions, conjuguée à une vague de chaleur, a permis aux Estoniens de profiter des festivités du Jour de la Victoire (23 juin) et de la Saint-Jean (24 juin). Si certaines des plus grandes célébrations ont été annulées, ce temps fort de l’année en Estonie a pu être fêté « normalement ». Ainsi, le traditionnel défilé militaire du 23 juin s’est déroulé à Paide en présence des plus hautes autorités de l’État. Ensuite, les Estoniens ont pu fêter le solstice d’été, en famille, à la campagne ou en participant à des événements musicaux (comme le célèbre Feu de la Saint-Jean de Pühajärve, festival de deux jours prisé des jeunes).

Avec la forte baisse du nombre de cas, la question des voyages internationaux a refait surface. En Estonie, les autorités ont déploré le maintien de règles strictes en Finlande, qui ne permettaient pas aux Estoniens travaillant en Finlande de faire facilement des allers-retours entre les deux rives du golfe de Finlande. Depuis le début de la seconde vague, les Estoniens travaillant dans des secteurs déclarés non essentiels par la Finlande étaient face à un choix : vivre séparés de leur famille restée en Estonie jusqu’à la fin de la crise ou rentrer en Estonie sans pouvoir revenir en Finlande. L’attitude de la Finlande vis-à-vis de l’Estonie – expliquée en partie par le refus en Finlande de traiter les pays voisins différemment (le virus circulait activement dans le nord de la Suède) – a été critiquée en Estonie. La Première ministre Kaja Kallas a même envoyé une lettre en ce sens à son homologue Sanna Marin. Les Estoniens ont pris conscience que la Finlande ne voyait pas en l’Estonie un partenaire essentiel, tel que l’Estonie en voit un en la Finlande. Finalement, la Finlande a levé les restrictions et travailleurs et touristes peuvent désormais se rendre de l’autre côté du golfe.

Le mois de juin rime aussi avec cinéma. Avec la réouverture des salles obscures en mai, les Estoniens vont pouvoir découvrir les nouvelles sorties. Premier film estonien présenté au public : Eesti matus (Funérailles estoniennes, d’après la pièce de théâtre d’Andrus Kivirähk)) de René Vilbre, réalisateur de la trilogie Klassikokkutulek (Réunion de classe). Le long-métrage réunit Markus Habakukk et Sandra Ashilevi dans les rôles principaux et certains des acteurs estoniens les plus prolifiques des dernières années (Ago Anderson, Tambet Tuisk, Peeter Oja).

À l’approche du Festival de Cannes, le cinéma estonien se réjouit de la sélection du film finlandais Compartiment nº 6 pour la compétition officielle. Cette adaptation au cinéma du roman de la Finlandaise Rosa Liksom a été réalisée par le Finlandais Juho Kuosmanen sur un scénario des Estoniens Andris Feldmanis et Livia Ulman. Les costumes sont de l’Estonien Jaanus Vahtra.

À l’étranger, la fin de la dernière mission estonienne en Afghanistan a été symboliquement marquée par le retrait du drapeau national de la base où les Estoniens étaient en poste. L’Estonie était présente dans le pays depuis 2003 dans le cadre de la Force internationale d’assistance à la sécurité (jusqu’en 2014) puis de la mission Resolute Support. Plus de 2900 soldats estoniens ont servi dans le pays ; huit soldats y ont perdu la vie.

En football, l’équipe masculine estonienne a remporté la Coupe baltique, un tournoi opposant les trois pays baltes. Grâce à ses victoires en Lituanie (0-1) et contre la Lettonie (2-1), l’Estonie a renoué avec la victoire finale après 83 ans d’attente, son dernier succès dans la compétition remontant à 1938 ! Cette victoire permet aussi à l’équipe nationale de retrouver un peu le sourire : la victoire inaugurale contre la Lituanie a été la première victoire de l’équipe depuis deux ans.

À quelques semaines des Jeux olympiques de Tokyo, l’Estonie a perdu une chance de médaille en athlétisme. Non remis d’une blessure, le lanceur de javelot Magnus Kirt, vice-champion du monde 2019, a annoncé qu’il ne participerait pas au rendez-vous de l’été. De son côté, le lutteur Heiki Nabi n’a pas réussi à convaincre les instances de lutte antidopage de sa bonne foi après son récent contrôle positif. Le double champion du monde (2006 et 2013) et vice-champion olympique (2012) ne pourra pas tenter d’étoffer son palmarès.

Prévu en 2020 et reporté d’un an comme beaucoup d’événements dans le monde, le VIIIe Congrès mondial des peuples finno-ougriens s’est tenu à Tartu en juin 2021. Ce congrès, le premier de la série à se tenir en Estonie depuis 2004, s’est déroulé dans un contexte de frictions avec les autorités russes qui voient dans le mouvement finno-ougrien un outil pour s’immiscer dans la vie intérieure russe. En raison de la combinaison de la pandémie et des méfiances politiques en Russie, nombre de délégués n’ont pas pu venir en Estonie ou n’ont purement et simplement pas participé au congrès. Toutefois, les activités de travail ont pu avoir lieu par visioconférence. Pour l’occasion, la Banque d’Estonie a émis une pièce commémorative de deux euros.

Sur la scène politique, les yeux étaient tournés vers le parti Isamaa qui tenait son congrès à Tartu pour renouveler ses instances dirigeantes. L’élection du leader de la formation de droite était suivie car deux candidats au profil différent s’affrontaient : le président sortant Helir-Valdor Seeder et Lavly Perling, l’ancienne procureure générale d’Estonie, qui a rejoint le parti au début de 2021 et qui représentait le mouvement d’opposition interne au parti. L’élection de l’un ou de l’autre aurait un effet sur l’orientation du parti et plus largement sur les équilibres politiques sur la scène estonienne. C’est finalement H.-V. Seeder qui a été reconduit, ce qui va maintenir l’ancrage à droite du parti, en concurrence avec l’extrême-droite, et laisser le centre à d’autres formations comme c’était le cas jusqu’alors. (Une élection de L. Perling aurait sûrement recentré le parti pour en faire un concurrent du parti de la Réforme et d’Eesti 200.)

De plus, les travaux parlementaires avant la pause estivale ont été perturbés par l’opposition des députés d’extrême-droite à la création d’une base de données numériques (ABIS). Initié par la coalition gouvernementale précédente (à laquelle participait EKRE) et repris par la nouvelle coalition, le projet vise à moderniser les bases actuelles à bout de souffle. Le gouvernement estime que la base permettra d’accélérer l’identification de personnes dans le cadre d’enquêtes de police. Face aux arguments de l’opposition qui craint la mise en place d’un big brother estonien, la coalition a souligné que l’accès à la base restait conditionné à une autorisation judiciaire. Après des séances interminables en raison de la volonté d’EKRE de bloquer le projet, la loi a été adoptée par les députés. Sans tarder, la présidente de la République l’a promulguée. Toutefois, la cheffe de l’État n’a pas manqué de souligner que si la loi n’était pas anticonstitutionnelle, son contenu rappelait qu’un débat de société devait avoir lieu autour des récentes avancées en termes de numérique et des libertés individuelles, car le contrat social établi au début de la révolution numérique était insuffisant.

Deux femmes estoniennes sont à l’honneur sur la scène internationale. La théologienne Anne Burghardt a été élue secrétaire générale de la Fédération luthérienne mondiale, qui regroupe 148 églises luthériennes dans le monde. Elle sera la première femme et la première personne d’Europe orientale à occuper ce poste exécutif. De son côté, la cheffe de l’État Kersti Kaljulaid a été nommée pour deux ans mandataire mondiale pour « Toutes les femmes, tous les enfants » (Every Woman, Every Child), un nouveau poste créé par le Secrétaire général de l’ONU pour remplir les objectifs onusiens relatifs à la santé des femmes et des enfants. Ce poste fait suite à la fin des activités du Groupe permanent de haut niveau sur « Toutes les femmes, tous les enfants », dont Kersti Kaljulaid a été la coprésidente entre 2019 et 2021.

Trois villes d’Estonie se distinguent en Europe pour la qualité de leur air. La liste de l’Agence européenne pour l’environnement établie pour 2019-2020 classe Tallinn en quatrième position (derrière Umeå en Suède, Tampere en Finlande et Funchal au Portugal), Narva en 7e position et Tartu en 10e position.

Autre reconnaissance pour l’Estonie, depuis le 20 juin, le sõir (fromage fait à partir de fromage blanc non affiné originaire du Võrumaa et du Setomaa) est inscrit au registre des Indications géographiques protégées (IGP) de l’Union européenne. Il s’agit du deuxième produit estonien à bénéficier d’une IGP, après la « vodka estonienne » inscrite en 2019.

Enfin, membre du Conseil de Sécurité de l’ONU depuis un an, l’Estonie en a été la présidente pendant tout le mois de juin.

Photo : Kersti Kaljulaid remettant la Flamme de la Victoire aux membres de la Ligue de Défense. ERR / Ken Mürk