Début mars marquait la fin des 100 premiers jours du gouvernement de Jüri Ratas. L’activité du gouvernement est globalement saluée, malgré quelques petits scandales (affaire Repinski par exemple), et l’entente entre les partis de la coalition semble correcte. La volonté d’imposer certaines mesures n’est toutefois pas du goût de tous. L’opposition parlementaire a critiqué l’adoption en urgence de mesures fiscales et la chancelière de justice, Ülle Madise, conteste la constitutionnalité de la hausse brutale des taxes sur l’alcool. Du point de vue de la popularité des partis, le Parti du Centre tire bénéfice de son entrée au gouvernement, ce qui n’est pas le cas de ses deux partenaires, IRL et le Parti social-démocrate, dont le taux de popularité a baissé. Le parti de droite continue sa descente et semble même menacé de ne pas atteindre les 5% requis pour siéger dans certains conseils municipaux après les élections d’octobre prochain. Désormais dans l’opposition, le Parti de la Réforme a retrouvé son niveau de soutien traditionnel, juste derrière le parti de Jüri Ratas.

Symbole de la numérisation de l’État et de la société estoniens, le vote électronique fait l’objet d’un débat intense. La coalition gouvernementale a présenté un projet de loi visant à modifier le nombre de jours de vote, le faisant passer de sept à trois. Le gouvernement explique qu’il s’agit de simplifier le calendrier électoral et de faire coïncider jours de vote électronique et jours de vote par anticipation. Cette décision est présentée comme un compromis entre les trois partis du gouvernement alors que le Parti du Centre défend la suppression pure et simple de ce système de vote. Si le Premier ministre a lui défendu le vote électronique, d’autres personnalités ont réaffirmé leur opposition en expliquant qu’il s’agissait d’un outil au service du Parti de la Réforme (au cours des années passées, le Parti du Centre a multiplié les initiatives contre le vote électronique). Il est vrai que l’électorat du Parti de la Réforme utilise beaucoup plus cette méthode de vote que les électeurs du Parti du Centre. Les enquêtes ont pourtant montré que le vote électronique n’avait pas augmenté la participation d’un électorat particulier, mais surtout offert un autre moyen pour des personnes qui auraient quand même voté. De son côté, le Parti de la Réforme critique la mesure, ne comprenant pas que le gouvernement fasse marche arrière sur l’un des symboles de l’e-Stonie à l’étranger. La formation politique prône même un allongement de la période du vote électronique à dix jours.

Du côté du cinéma et de la télévision, les premiers EFTA (Eesti Filmi- ja Teleauhind), un nouveau prix créé cette année, ont été décernés. Le film de Triin Rummet Päevad, mis ajasid segadusse a remporté le prix dans six des douze catégories en compétition. La série ENSV (acronyme estonien pour République socialiste soviétique d’Estonie) dont l’action se déroule dans les années 1980 et diffusée depuis 2010 sur la chaîne publique ETV a obtenu le prix de la meilleure série. Les émissions Pealtnägija (ETV) et Su nägu kõlab tuttavalt (TV3) ont remporté les prix de la meilleure émission d’information et du meilleur divertissement.

En musique, le représentant de l’Estonie au prochain concours Eurovision de la chanson, qui aura lieu à Kiev en Ukraine, est désormais connu. C’est le duo Koit Toome – Laura Põldvere qui a remporté le concours Eesti Laul avec sa chanson Verona. Il s’agira de la première participation de Koit Toome à l’Eurovision et de la seconde de Laura Põldvere, qui a représenté l’Estonie en 2005, déjà à Kiev, au sein du groupe Suntribe (18e place en demi-finale).

Comme chaque année, la langue estonienne a été célébrée le 14 mars. Pour la dixième fois, la radio publique Vikerraadio a organisé une dictée. 5881 personnes y ont participé, ce qui constitue un nouveau record, 37 d’entre elles n’ont fait aucune faute.

Pour la première fois, début mars, un bus autonome sans chauffeur a circulé à Tallinn. Ce bus doit être utilisé lors de la présidence estonienne de l’Union européenne à partir de juillet entre le centre commercial Viru et le pôle Kultuurikatel. Dans le même temps, les tests de véhicules sans chauffeur sont désormais autorisés sur l’ensemble du réseau routier estonien depuis le 2 mars.

Deux disparitions ont fait la Une de l’actualité. L’acteur et metteur en scène Kalju Komissarov est décédé le 6 mars. Metteur en scène, notamment au théâtre Ugala de Viljandi à la fin du XXe siècle, Komissarov était depuis 2002 le directeur du département des arts de la scène de l’Académie de la Culture (Université de Tartu) de Viljandi. Cinq jours plus tard, le psychologue et homme politique Peeter Tulviste est décédé à son tour. Il s’était engagé en signant la Lettre des 40 (contre la russification) en 1980. Il a été le recteur de l’université de Tartu entre 1993 et 1998 et était membre de l’Académie des Sciences d’Estonie depuis 1994. Son rôle en tant que recteur dans le renouveau de l’université de Tartu a été salué à sa disparition. En 2001, il a été candidat à la présidence de l’Estonie.

Enfin, en sport, à la suite des championnats du monde de ski nordique de Lahti (Finlande) à l’approche de la fin de la saison sportive et à moins d’un an des Jeux olympiques, l’absence de résultats probants de la part des Estoniens interroge. Alors que la plupart des représentants estoniens sont regroupés au sein d’une équipe privée, la fédération de ski est accusée de ne pas investir suffisamment dans les équipes nationales. Les multiples succès d’Andrus Veerpalu, de Jaak Mae et de Kristina Šmigun-Vähi dans les années 2000 semblent bien lointains pour un pays qui a pourtant sa place dans le ski de fond avec l’accueil de compétitions de premier rang à Otepää.