10 ans après le déplacement du Soldat de Bronze du centre de Tallinn vers le cimetière de l’Armée situé dans le quartier de Juhkentali, les divergences historiques autour de la fin de la Seconde Guerre mondiale continuent d’alimenter le débat. Cette année, le Parti du centre se trouve confronté à ses divisions internes. Le 9 mai, jour de la fin de la guerre pour les Russes, les députées Olga Ivanova et Oudekki Loone ont créé la polémique par leurs déclarations à proximité du monument. La première a donné une interview à la chaîne russe Sputnik allant contre le principe adopté pour tous les membres du gouvernement et représentants de l’État de ne pas répondre à ce média considéré comme un média de propagande. Quant à Oudekki Loone, la députée a déclaré à la télévision estonienne que sans la victoire des Alliés, dont l’URSS, l’État estonien n’existerait pas. Ces actes ont été critiqués dès le lendemain par le Premier ministre et président du Parti du centre Jüri Ratas, qui a entre autres rappelé que le 9 mai 1945 marquait le début d’une terrible occupation. Ces critiques ont été à leur tour rejetées par Olga Ivanova et Oudekki Loone, auxquelles s’est associée la députée européenne Yana Toom. Celles qui sont désormais surnommées les « trois sœurs » ont critiqué le Premier ministre en déclarant que le Parti du centre ne lui appartenait pas.

Autre affaire impliquant un membre éminent du Parti du centre : les déclarations de Mihhail Korb sur l’Otan. Lors d’une réunion avec des anciens combattants soviétiques à Haapsalu, le ministre de l’administration publique a déclaré ne pas être favorable à l’appartenance de l’Estonie à l’Alliance atlantique. Enregistré par un journaliste présent sur place, les propos ont rapidement provoqué l’indignation dans le pays. Le jour même de la publication de l’information dans la presse, Mihhail Korb a remis sa démission au Premier ministre Jüri Ratas. Outre la prise de position du ministre, c’est la tenue de propos différents selon l’audience qui interroge. Alors que l’ancien ministre a plaidé une mauvaise interprétation de ses propos dans une interview donnée aux journalistes du journal télévisé de la chaîne ETV, il a réaffirmé son droit d’avoir un avis différent lors d’une interview avec des journalistes de la chaîne ETV+, la chaîne publique russophone, seulement quelques minutes plus tard. Cette affaire met en lumière les stratégies de communication différentes en fonction du public visé, qu’il soit estonien ou russe.

À Tallinn, où le Parti du centre contrôle l’ensemble de l’appareil municipal, une nouvelle affaire de corruption a éclaté. Le maire-adjoint Arvo Sarapuu est accusé de violation des contraintes procédurales dans le cadre d’un appel d’offre relatif à l’organisation du ramassage des ordures à Tallinn. Selon les services du procureur, le maire-adjoint, également propriétaire de l’entreprise d’autobus ATKO Grupp, a organisé la participation de son entreprise et de ses filiales à l’appel d’offre par l’intermédiaire d’une société fictive. L’entreprise en question a été par la suite choisie par la municipalité. Affirmant qu’ils ignoraient tout de l’affaire, le président du Parti du centre Jüri Ratas et le maire par intérim de la capitale estonienne Taavi Aas ont aussitôt réclamé la démission d’Arvo Sarapuu.

Enfin, un autre débat est né des déclarations de Mihhail Kõlvart, un des autres maires-adjoints de Tallinn et vice-président du Parti du centre. Celui-ci a en effet estimé que les célèbres fêtes du chant (laulupidu) attireraient plus les russophones d’Estonie si le programme comportait au moins un chant en russe. La plupart des réactions, dont celles des principaux chefs de chœur qui ont dirigé lors des fêtes du chant passées, ont souligné la dimension avant tout estonienne des fêtes du chant. Cette évocation de la place du russe dans le programme de la fête du chant a fait resurgir le souvenir des fêtes du chant de l’époque soviétique au cours desquels les chants en russe présents dans le programme étaient avant tout des odes à Lénine et au communisme.

Sur la scène diplomatique, une nouvelle affaire de monument se serait immiscée dans les relations russo-estoniennes. Dans la région du Virumaa oriental, à Kiviõli, une stèle à la mémoire d’aviateurs soviétiques morts pendant la Seconde Guerre mondiale a été vandalisée. L’événement n’a pas laissé les diplomates russes sans réaction : le consul général russe à Narva a effectué une visite remarquée auprès du maire de Kiviõli. En réaction (les événements n’ont toutefois pas été officiellement liés), les autorités estoniennes ont déclaré le consul général et le consul-adjoint persona non grata en Estonie. À leur tour, les autorités russes ont répliqué en expulsant le consul général estonien de Saint-Pétersbourg et le chef de l’antenne consulaire de Pskov.

Du côté de la santé économique de l’Estonie, les récents indicateurs ont apporté une bonne surprise avec un taux de croissance de 4,4 % au premier trimestre 2017 (par rapport à la même période en 2016). Ces bons résultats s’expliquent par le dynamisme de l’industrie productive, en particulier les secteurs des produits métallurgiques, des pièces pour véhicules et de l’agroalimentaire. Le commerce et la construction sont également concernés par les bons chiffres. Ces résultats sont en partie expliqués par la meilleure santé économique des partenaires de l’Estonie, cette dernière restant largement dépendante de ses exportations.

Pour sa part, le gouvernement estonien a adopté un plan d’investissements de 135 millions d’euros dans les transports en Estonie. Les efforts financiers doivent d’abord permettre une amélioration sur les grands axes routiers liant Tallinn à Pärnu, Tartu et Narva, notamment par des mises en 2 × 2 voies. Ensuite, outre des investissements sur les voies ferrées existantes, une première prolongation de la voie ferrée Tallinn-Riisipere a été décidée (l’objectif étant à terme de lier à nouveau la capitale estonienne à Haapsalu, voire Rohuküla, le port d’où partent les liaisons pour Hiiumaa).

Comme chaque année, l’armée estonienne a été mobilisée dans le cadre de ses traditionnelles manœuvres baptisées Kevadtorm. En 2017, plus de 9 000 soldats y ont pris part, notamment les militaires étrangers (Français, Britanniques) présents à Tapa dans le cadre de l’Otan. Les membres de la réserve estonienne ont ainsi pu participer à des exercices militaires aux côtés de professionnels.

Enfin, au printemps, l’événement médiatique le plus attendu était le concours de l’Eurovision, qui s’est tenu cette année à Kiev en Ukraine. Représentée par la chanson Verona interprétée par le duo Koit Toome – Laura Põlvere, l’Estonie a une nouvelle fois échouée à se qualifier pour la finale, ne terminant qu’à la 14e place (sur 18) de sa demi-finale. Les résultats détaillés indiquent que le titre a su conquérir le public, mais pas les jurys des différents pays participants.